Ascomycètes coprophiles
Le Cotentin est un territoire bien connu pour l’élevage de sa race de vaches normandes, c’est aussi le berceau du selle français, des ânes du Cotentin ou encore des roussins de la Hague. Il possède plus de trois cents kilomètres de côtes, aussi le Conservatoire du Littoral a réintégré sur ses falaises les chèvres des Fossés et les vastes dunes de Biville ou encore d’Hattainville sont le domaine des brouteurs de tout poil.
Force est de constater que notre territoire regorge d’une biodiversité remarquable et il nous apparu intéressant d’étudier outre les coprins, panéoles, psilocybes fleurissant les pâtures, un autre biotope tout aussi important, celui des excréments du cheptel cotentinois.
En effet, les champignons coprophiles sont des champignons saprophytes qui se nourrissent d’excréments, en particulier d’animaux herbivores. En contribuant à décomposer, éliminer et recycler les excréments, ils jouent un rôle sanitaire important et en libérant des éléments nutritifs pour les plantes ils participent à la fertilisation des prairies.
Ils présentent diverses adaptations permettant à leurs spores d’être dispersées puis ingérées involontairement par des animaux herbivores car leur germination est facilitée par le passage dans l’intestin d’un animal.
Pour se propager à une assez grande distance dans le milieu environnant, les spores d’Ascomycètes coprophiles sont souvent déchargées de façon explosive par les asques; de plus elles sont souvent munies de gaines ou d’appendices gélatineux qui favorisent leur agrégation et rendent les lancements de spores plus performants. De plus ces gaines ou appendices gélatineux facilitent l’adhérence des spores aux végétaux sur lesquels elles atterrissent. D’autre part, en attendant d’être ingérées par un animal et cette attente peut être longue, la présence de pigments violets ou bruns dans leur paroi épaisse protège leurs gènes de l’effet nocif du rayonnement ultra-violet.
Une fois ingérées par un animal et avoir transité par son intestin, les spores sont expulsées avec les excréments, et si les conditions d’humidité et de température le permettent elles germent et produiront des fructifications qui à leur tour produiront de nouvelles spores.
Les champignons coprophiles présentent plusieurs intérêts scientifiques :
Certaines espèces produisent des molécules antifongiques ou antibactériennes pour éliminer leurs concurrentes ou bien des métabolites bioactifs impliqués dans la recherche de médicaments, par exemple ceux régulant le taux de cholestérol. Ils produisent des enzymes capables de dégrader la cellulose et la lignine, pouvant donc être utilisées dans la dégradation de la biomasse végétale et la production de biocarburants. D’autre part leurs spores à paroi épaisse sont bien conservées dans certains milieux tels que les sédiments ou la tourbe, elles peuvent donc être utilisées comme indicateur (paléoécologique) de la présence passée de troupeaux d’herbivores.
Les différents groupes de champignons strictement coprophiles :
Ascomycota : 180 espèces environ; Basidiomycota : 80 espèces environ; Zygomycota : 20 espèces environ.
Au sein de l’AMC, Edmond Pointe, s’est lancé dans l’aventure et on peut dire qu’il s’est pris au jeu.
Il vous livre, ici, sa méthode de culture :
Récolte
Echantillons collectés : excréments de divers mammifères herbivores tels que moutons, lapins, chèvres, chevreuils dans les bois et dunes de Biville…
Chaque prélèvement est placé dans une petite boite plastique hermétique.
Au retour les prélèvements sont mis à sécher individuellement en atmosphère sèche. Ils peuvent rester ainsi très longtemps, jusqu’à ce qu’ils puissent être réhydratés et incubés.
Culture en milieu humide. En vue des observations mettre un fragment de substrat dans une chambre humide, J’utilise une boite de Pétri avec un disque de coton maintenu constamment humide. Mettre la boite à la lumière avec une température ambiante au-dessus de 20°.
Observations
Les échantillons sont examinés au moment de l’incubation puis à des intervalles réguliers jusqu’à ce qu’aucune nouvelle espèce ne soit observée. La loupe bi ou trinoculaire et le microscope sont indispensables pour étudier ces champignons, souvent de moins de 1mm.
Détermination
D’abord les clés. On peut en télécharger sur internet, par exemple sur ascomycètes.org ou sur Ascofrance.
Les livres : Mycologie forestière de Lanier, en français ; Le fungi fimicoli de Doveri, en anglais et italien ; et aussi l’avis de mycologues dans le blog d’ascofrance.
Remarque il faut beaucoup de propreté. Je nettoie les récipients, les pinces et les aiguilles avec le l’alcool dénaturé à 70° avant et après chaque utilisation, cela évite la contamination du matériel par des microorganismes pathogènes et la pollution de l’échantillon étudié par une sporée étrangère.
Études fimicoles du Cotentin :
Études fimicoles hors Cotentin :